Pour faire face à la fermeture des centrales nucléaires et à la baisse de livraisons de gaz russe, l’Etat allemand a acté la prolongation de l’utilisation des centrales électriques au lignite (un type de charbon) pour compenser la pénurie d’énergie hivernale.
À la suite de l’éclatement de la guerre en Ukraine, l’Allemagne a dû s’affranchir de sa dépendance au gaz russe et s’est vu contraint de recourir à nouveau au charbon, une énergie pourtant très émettrice en CO2. Etant donné que les dernières centrales nucléaires ont également dû fermer les portes en avril dernier, un raidissement suscité entre autres par l’effroyable catastrophe nucléaire de Fukushima en 2011, la coalition Scholz a entrepris la réouverture de vingt-sept centrales à charbon dont le tiers au lignite, et ce jusqu’au 31 mars 2024. La mesure d’urgence adoptée l’année dernière et prolongé pour la saison hivernal à venir, permettra à termes de maintenir une capacité de production de lignite de 1, 9 GW, qui viendra s’ajouter au 45 GW de centrales électriques à charbon. Cette initiative, très critiquée à l’étranger, n’a qu’un seul objectif : maintenir le prix de l’électricité en évitant le recours à des centrales à gaz de Russie dont l’Allemagne était principalement dépendante avant les prémices de la guerre.
Mesures contradictoires
Cette décision contrevient à l’engagement qui avait été pris par le gouvernement Merkel qui s’était engagé à fermer progressivement le robinet des centrales à charbon d’ici 2030. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que l’Allemagne marche à reculons. L’hiver et l’automne derniers, des centrales électriques au lignite avaient été remises en service pour compenser la pénurie d’énergie, liée notamment au contexte géopolitique en tension par la truchement de la conflagration opposant l’Ukraine à la Russie et aux défaillances du nucléaire français. Néanmoins, les chiffres corroborent les intentions du gouvernement à se débarrasser de cette énergie excessivement polluante. Au cours du troisième semestre 2023, le pays a produit la plus faible quantité d’électricité jamais obtenue avec le charbon : 22, 3 TW. A titre de comparaison, ce chiffre était trois fois plus élevé, il y a huit ans, dépassant la barre des 60 TWh. Malgré quelques déviations ayant peu ou prou fait grand bruit, l’actuel quatrième puissance mondiale tient toujours le gouvernail et se prépare bon gré mal gré à exaucer ses promesses à l’aune des années 2030.
Jessy Lemesle avec l’AFP