La deuxième division du championnat français de League of Legends a commencé ses phases finales . Parmi les équipes en compétition, la JL joue sa place pour la finale contre IZI Dream. Pour mieux appréhender ce qu’est l’E-Sport et de manière générale que ce sont ces nouveaux métiers liés à Internet, j’ai rencontré Kada un streamer de la JL sur la plateforme Twitch spécialisé dans les jeux vidéos.
L’équipe JL sur le jeu League of Legends (LoL) aura besoin de soutien pour sa demi-finale de Division 2 du championnat français le mardi 26 mars, et pour cela elle peut compter sur une communauté soudée. Kada, streamer au sein de la communauté JL n’hésitera pas à donner de sa voix au « cast » c’est à dire au commentaire, pour faire vivre son équipe pour les milliers de fans. C’est un jeune homme d’une vingtaine d’années qui s’approche de moi et me tend la main, le sourire aux lèvres entouré d’une barbe noire fournie et de cheveux courts et ondulés. Il est directement en confiance, n’hésitant pas à me poser plusieurs questions sur le déroulement de l’entretien et sur les éléments dont j’aurais besoin pour écrire mon article. Il me propose des pistes comme son activité de streaming, l’E-Sport ou les voyages qu’il a pu entreprendre. Prenant ainsi un pas d’avance sur toutes les questions que je comptais lui poser. Ne pouvant pas me recevoir chez lui, il m’a conseillé ce parc d’une ville du 91 dans lequel il a toujours habité pour que l’on se rencontre au calme. Un endroit où il allait régulièrement plus jeune avec ses amis pour pique-niquer dans l’herbe et passer du temps avec eux. Cette valeur du partage et l’importance de l’amitié, c’est quelque chose qui encore aujourd’hui guide tout son travail et l’inspire énormément.
C’est en 2022 qu’il rejoint la « JL » ou « Jobless », une communauté qui, comme son nom ne l’indique pas regroupe des streamers et créateurs de contenus très professionnels. Il l’intègre après avoir rencontré aux grès des sessions de jeux vidéos son ami JL Tomy – de son vrai nom Toma Abdellaoui un des fondateurs de la communauté réunissant aujourd’hui près de 1,2 millions de followers sur Twitch – . La JL c’est aujourd’hui une véritable famille pour lui. Le live-streaming ou streaming c’est l’activité de diffuser du contenu en direct en ligne, cela peut être un jeu vidéo auquel le streamer est en train de jouer. Le talent du streamer peut à la fois être dans la performance technique sur le jeu ou bien dans sa capacité à animer son live et interagir avec son « chat ». Une messagerie instantané qui permet à ceux qui regardent de discuter entre eux et d’envoyer des messages à ceux qui animent. Les meilleurs streamers dans le jeu vidéo sont généralement ceux qui savent combiner ces deux aspects.
« Les humains derrière les pseudos »
Pour Kada qui s’est lancé dans le streaming pendant le confinement en 2020, c’est l’opportunité de continuer à développer sa passion qu’est le jeu vidéo au sein d’un véritable groupe d’amis. Alors qu’il se retrouvait bloqué chez lui comme la plupart d’entre nous, il a compris qu’avec sa connexion Internet et son ordinateur il pouvait créer du contenu tout en jouant avec ses amis. Pour lui le streaming c’est l’occasion d’interagir en direct avec ses spectateurs via le chat ou de les inviter dans ses parties pour partager des moments mémorables. Mais ce qu’il préfère surtout, c’est quand le virtuel devient réel et quand la barrière qui le sépare de ses « followers » est brisé, lorsqu’il rencontre « les humains derrière les pseudos » lors d’évènements. Il m’explique alors avoir créé de véritable amitiés avec des gens qu’ils le suivaient et qu’il a rencontré aux « Div2 Days » et « LFL Days », des conventions organisés autour des ligues professionnelles d’E-Sport sur le jeu LoL.
La vie d’une équipe passe par les créateurs qui sont autour
L’équipe JL sur LoL est ainsi menée par des créateurs de contenus dont son fondateur JL Tomy, ils sont essentiels pour regrouper des fans et partager ensemble un projet, un espoir d’atteindre la première division du championnat, la LFL (Ligue Française de League of Legends). Kada m’explique que « les moyens ça fait 70 % des performances d’une équipe », et dans ces moyens le personnel encadrant est très important. Au delà des 5 joueurs et du Coach qui décide des stratégies, on retrouve énormément de monde qui s’active au fonctionnement de l’équipe. Préparateurs mentaux et physiques, assistant coach, remplaçants et finalement créateurs de contenu.
Que ce soit Kada, Tomy ou les nombreux autres streamers qui composent la JL, ils sont aujourd’hui nécessaires pour faire vivre les équipes d’E-Sport. Sans création de contenu pour promouvoir les équipes, elles n’auraient pas d’identité : « Un mix, c’est a dire une équipe de 5 joueurs qui ne sont pas encadrés, ca marche un temps puis ça s’éffondre » m’explique-t-il. Pour lui l’essence même de chaque écurie sur n’importe quel jeu c’est sa capacité à réunir des fans, créer des véritables communautés qui vont bien au-delà du jeu vidéo. Il m’explique que la plupart des équipes qui ne sont pas portés par une voix comme celle de Tomy sont obligés de faire appels à des « content-creators ». Des ambassadeurs sous contrat qui représentent alors l’identité de l’équipe en créant du contenu sur Internet. Mais lorsque les créateurs de contenus sont déjà intégré dans le groupe, comme Kada, l’identité et la passion transmise n’en est que plus authentique. Il peut participer à la vie de la communauté et en échange, recevoir une part de visibilité et pratiquer sa propre activité de streaming. Un partage qui se fait à tout les niveaux puisqu’il me raconte notamment sa manière de travailler avec Tomy : « Quand Tomy à une sponso pour mettre en avant un produit sur son stream, il nous invite et après derrière, il nous dit : ‘tiens comme vous avez participé voilà votre part des revenus’ ».
« Tout peut s’arrêter du jour au lendemain »
Avec ses 25 000 abonnés sur Twitch, Kada pourrait vivre aujourd’hui convenablement en streamant en direct 6 jours sur 7, de 16h à 21h, toujours sous la bannière JL. Un train de vie qu’il considère confortable puisqu’il peut choisir lui même ses horaires et commencer plus tôt ou finir plus tard. Les « subs », c’est-à-dire les abonnements payants à sa chaîne (permettant notamment d’éviter les publicités), les dons, ou encore le sponsoring et la publicité lui permettent de se verser lui-même un salaire chaque mois. Pourtant il fait le choix en parallèle de continuer des études, une licence d’informatique en poche et en préparation d’un master l’année prochaine. Un avis qu’il partage avec sa mère, à la fois heureuse de voir son fils épanoui dans son activité mais aussi rassurée par la sécurité du diplôme. Il le dit lui même : « Sur Internet tout va très vite, la carrière d’un streamer c’est 3-5 ans et tout peut s’arrêter du jour au lendemain ». Si il ne se voit pas nécessairement faire ça toute sa vie, il profite largement de cette activité qu’il considère faire surtout pour s’amuser en prenant une année sabbatique qui lui a notamment permis de faire de nombreux voyages.
Il s’est rendu avec Tomy aux VCT ( Valorant Championship Tour, un tournoi international sur le jeu vidéo Valorant) de Sao Paulo au Brésil pour « cast », les matchs en direct, rediffusé devant des milliers de personnes en France. Cette activité de cast, il aime particulièrement l’exercer sur LoL, où il commente les matchs de l’équipe créée par Tomy. Il sera donc bien présent mardi pour commenter les faits de son équipe.
Toujours avec ce groupe soudé que sont les streamers de la JL, il a ajouté à son expérience au Brésil, un tour du monde sponsorisé par le jeu mobile « Clash Of Clans ». Ils ont visités le Japon, la Corée du sud, les Etats-Unis, le Canada puis finalement la Finlande et la Laponie. Cette dernière destination il m’en parle comme une expérience qui au-delà d’un cadre splendide, est surtout une occasion de se retrouver dans un chalet avec ses amis pour s’amuser et profiter.
Le streaming, c’est la possibilité pour Kada de porter la voix de la communauté JL, mais aussi de l’équipe E-Sport qui en découle. Cette activité il la considère comme « un truc de potes », et s’estime véritablement chanceux aujourd’hui d’avoir pu en faire son métier au moins un temps puisque « des streamers qui parviennent à en vivre c’est vraiment 0,0001 % » comme il me le dit. Il reste très lucide quand à la stabilité de sa carrière sur Internet mais aimerait pouvoir développer cette activité le plus longtemps possible qui est pour lui le moyen de vivre l’une de ses passions. Dans tout les cas il soutiendra la JL ce mardi, en espérant qu’ils puissent décrocher la place en finale et la remporter pour avoir une chance d’atteindre la première division.
Jules CORNELOUP le 24/03/24